Lever du soleil sur Barnave. Moi je suis dehors, baskets aux pieds, yeux encore à moitié fermés, pour mon jogging pré-prandial… Les rêves de la nuit n’ont pas encore quitté mon corps, et les pensées du matin sont informes, poreuses et fluides. Je dois me rendormir un peu, parce que tout de suite après, je suis sur la piste caillouteuse. L’air sent bon. Je rebondis à chaque pas sans effort. Mes poumons font le même gros bruit que le soufflet des mules. Passant entre les vignes, je me rends compte que tout baigne dans une lumière jaune dorée. Tout est en contre-jour. Jaune, doré, et noir. Le vert est doré. Le gris est doré. L’air est doré. Je suis seul. Même les arbres semblent encore dormir.
Je tire ma tête vers le haut pour avoir le dos bien droit. Je détends mes épaules, et je me laisse filer. Mes jambes m’emportent comme un cheval qui s’emballe. Mes pieds trouvent le bon endroit pour se poser tous seuls. Je suis le cavalier qui laisse filer sa monture. Je lui fais confiance. Les yeux ouverts.
Je trace. Je file. Le vent siffle dans mes oreilles. Et je baigne dans ce jus de soleil, cette lumière tellement dense que je flotte dedans. Je ne pèse plus rien. Je griffe le sol à chaque foulée. Derrière moi les cailloux s’envolent aussi.
Je trace. Je file. Le vent siffle dans mes oreilles et fait pleurer mes yeux… Il y a six mois,je ne savais plus marcher sans me tenir aux murs. Là je trace. Je file. La joie siffle dans mes oreilles et fait pleurer mes yeux.
Cela me donne envie de courir à nouveau !!
Le Manitou est un poète en plus d'être un grand homme.