Go, libertés, survie, stratégie…

L’un des principes de base de la stratégie, c’est de conserver ses libertés, et de priver l’ennemi des siennes. Ce weekend, j’ai fait face, au sein d’une équipe de secouristes, à une guerre très inégale entre plusieurs dizaines de motos cross ultra-mobiles sur un circuit de 7km, et 4 équipes de secouristes à mobilité réduite : sur le circuit, les accès en véhicule sont extrêmement difficiles, et possibles uniquement en des points précis. Pire, chaque équipe ne disposait même pas d’un véhicule. Pire encore, les radios qui passaient bien depuis les postes statiques, lors des tests radios du matin, ne passaient plus dès que les équipes se sont mises à bouger pour aller récupérer les premiers blessés… Un mot pour résumer : le bordel. Nous avons eu de la chance… et de l’assistance pro.

Chapeau bas, en passant aux pompiers de Die, et au SAMU de Valence qui ont fait du super boulot… en conservant leur liberté de mouvement dans un environnement pas évident (la Rover Rouge a failli verser avec un blessé dedans… c’était chaud !), et en assurant des communications parfaites.

Mais bon. J’arrive au coeur du sujet : la stratégie.

Chaque pièce d’un dispositif doit, pour être efficace, avoir au moins trois choses :

sa liberté d’action, en se protégeant et se libérant de diverses contraintes… ces contraintes sont diverses et varient en fonction du contexte, mais ça va de l’alimentation en O2 du cerveau des équipiers à la possibilité de lever la tête sans prendre une balle, en passant par la régulation thermique, la vision (règle des trois, CVMD…), l’équipement adapté, etc.

sa liberté de mouvement, pour être utile au bon endroit... cette liberté dépend des moyens de transport, du terrain, de la possibilité ou pas de passer (le4X4 des pompiers est un super véhicule, mais devant le bouchon sur la piste pour accéder au circuit il n’a pas pu passer…)… mais aussi des possibilités de navigation : savoir où on va et comment faire pour y aller ;

sa liberté de communiquer : pour ça il faut des moyens de communication, mais aussi le droit de le faire, et quelqu’un en face qui écoute… sinon on communique tout seul.

Combien de chefs fournissent ces libertés là aux gens qui travaillent avec eux ? Combien de chefs les en privent, même involontairement ?

Un bon dispositif n’est pas utile tant que les éléments qui le composent ne disposent pas de ces trois libertés de base là. Or, tout le problème réside dans le contrôle des équipiers et de leurs actes, du point de vue du chef. Culturellement, le chef impose sa volonté et espère assurer la qualité du travail de ses subordonnés en restreignant leur liberté. On pense que moins un subordonné a de libertés, et moins il risque de faire d’erreurs. Ça peut être vrai dans une certaine mesure, mais passé un certain seuil, le subordonné perd une ou plusieurs de ses libertés essentielles dans la bataille, et devient inutile.

Un bon chef est un fournisseur de libertés. Il fixe une limite gauche et une limite droite. Il définit à l’avance ce que les équipiers n’ont pas le droit de faire. Il définit la tâche à accomplir, dans les grandes lignes, et avec juste assez de détails… et il laisse faire, en observant de loin, et en corrigeant seulement au besoin.

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